Journée d'étude : "les fictions du bourreau"

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Informations de l'événement

Date

Amphithéâtre Chasles, Université Paris-Sorbonne , 54 rue Saint-Jacques 75005 PARIS

Organisée par Antony Soron et Eric Hoppenot
Sous l’égide du CIEF Université Paris-Sorbonne, Centre International d’Etudes francophones
Avec le soutien de ESPE Université Paris-Sorbonne Ecole Supérieure du Professorat et de l’Education

Il va de soi qu’on demandera un jour des comptes à celui qui a commis des crimes en bande organisée ; il va de soi qu’au nom des violés, des massacrés, des annihilés, leur famille, leurs proches voudront entendre de sa bouche même l’aveu de son irréparable forfait.

Ce jour-là, qui est censé n’intervenir souvent qu’après des mois voire des années, a toutes les chances d’éclairer la personnalité de celui qui a été placé sur le banc des accusés, seul ou avec ses comparses. Toutefois, cette mise en lumière demeure problématique en ce sens que l’accusé ne répond que rarement à l’attente de ceux qui lui demandent des comptes. D’une façon ou d’une autre et quel que soit le contexte sociologique ou historique, se met en place chez lui une stratégie de défense relevant de l’esquive voire du pur mensonge.

La littérature comme le cinéma s’est emparée de cette figure à la fois abominable et fascinante de l’homme qui nie, de l’homme qui récuse toute responsabilité dans ce qu’on lui reproche. Les stratégies de défense qu’il met en place son variées induisant une forme d’auto-persuasion systématique qui finit par avoir valeur de système.

La question serait donc de savoir quelles sont les stratégies de défense que les pires criminels de l’époque contemporaine ont imaginées pour se défausser face à des accusations qui les accablent. Rithy Panh, dans son livre, L’élimination, co-écrit avec Christophe Bataille et publié en 2012, réussit à mettre en scène ses conversations avec le dénommé Douch responsable du centre de torture Khmère rouge « S 21 ». Il en ressort le dévoilement d’une autre histoire authentiquement fictionnelle quoique très cohérente où le bourreau tend à occulter les faits qui lui sont reprochés pour mener la discussion vers des terrains moins minés.

La figure de celui qui a atteint à la vie et/ou à la dignité humaine dans le cadre d’une oppression collective organisée met à jour, quand on parvient à la saisir sur le vif, les forces insoupçonnées du mensonge, propre de l’homme aussi et surtout.

Le propos de la journée d’études consistera, selon des perspectives variées croisant les points de vue de spécialistes de littérature et de philosophie, à interroger le mensonge du bourreau en tant extrémité du potentiel mensonger de l’être humain. Pour à terme, se poser la question : en quoi cet autre, cet être dissemblable au possible, cet ennemi absolu, ne m’est-il pas si inconnu et par là même m’apparaît-il si dérangeant ?

Contact : antony.soron@espe-paris.fr